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VOUS ÊTES FATIGUÉS ? TANT MIEUX !

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Dans son Ode à la fatigue, le philosophe Éric Fiat met en lumière les bienfaits du ralentissement, ou comment accepter ce risque de fatigue face à notre société et ses diktats de performance et d’infaillibilité. Alors, laissez-vous bercer par sa pensée lors d’une pause philosophico-musicale.

Spécialiste des questions d’éthique médicale et de philosophie morale, Éric Fiat enseigne la philosophie à l’université Paris-Est de Marnela-Vallée. Après avoir notamment publié Petit Traité de dignité (Larousse, 2012), il a fait paraître Ode à la fatigue (Éd. de L’Observatoire) en 2018. Éric Fiat rêve d’une solidarité des fatigués, d’un monde où l’on puisse avouer son épuisement… Phénomène universel et pourtant peu traité par les grands écrivains et philosophes, la fatigue est le démon mesquin de la quotidienneté. Comment vivre avec elle, qui rend parfois la vie si difficile ?

Est-il possible de pratiquer les vertus d’Aristote (courage, tempérance, altruisme) quand nous sommes épuisés ? La fatigue n’élargit-elle pas l’écart qui existe entre ce que nous sommes et ce que nous voudrions être ? Pour Éric Fiat, ce n’est pas en luttant mais en composant avec elle qu’il est possible de nous en faire une amie. Car s’il existe de mauvaises fatigues comme le burn out, ne désespérons pas d’en vivre aussi de bonnes. Le philosophe montre alors qu’il n’est pas impossible à un homme fatigué d’aimer la vie. Il prône, face à notre société et ses impératifs de performance, une acceptation du risque de la fatigue, un abandon bénéfique qui permet d’assumer sa finitude.

Les écrits d’Éric Fiat sont inspirés des réflexions de Gaston Bachelard sur le dormeur éveillé. « Lorsqu’on se trouve dans cette attitude suspensive entre la veille et le sommeil, cela nous révèle
quelque chose de nous-mêmes, du monde et des autres. L’homme en forme, frais et dispo a tendance à partir à la conquête de soi, des autres et du monde. L’homme qui est un peu fatigué – fatigué d’une bonne fatigue – est « condamné » à la rêverie et laisse le monde et les autres venir à lui. Il se laisse aussi lui-même venir à lui, car lorsqu’on écoute les leçons qu’elle a à nous donner, la fatigue nous place dans une allure de vie plus calme, plus attentive et notre for intérieur s’enrichit. » (https://www.vousnousils. fr/2018/07/04/eric-fiat)

Dans un monde où les espaces de rêverie, de silence, d’inactivité, de solitude, se réduisent à vue d’oeil, quelque chose d’essentiel se perdrait pour le philosophe. Et puis, on n’y échappe pas. L’homme est voué à la fatigue. « La fatigue appartient à la condition humaine. Dans l’essence de l’homme et plus que chez tous les autres vivants, il y a quelque chose qui le voue à la fatigue. […] L’homme est travaillé par une inquiétude, par un questionnement permanent. Pauvre en instincts, il vient au monde sans mode d’emploi, cherche longtemps les chemins de sa vie sans les trouver. Il fait le dur et fatigant métier d’exister. […] C’est pourquoi la fatigue n’est pas qu’un dysfonctionnement, une pathologie, l’affaire des médecins. Il est normal d’être fatigué quand on est homme. » (Philosophie magazine – 22/10/2019)

Puisque tous les vivants connaissent la fatigue. Et que l’époque est plutôt harassante. « Il faut que les hommes puissent dire leur fatigue sans que cet aveu soit immédiatement vécu comme une défaite, le signe d’une insuffisance ou d’une inadéquation. La fatigue acceptée et assumée apprend l’humilité, à s’estimer à sa juste mesure. » (Libération – 22/6/2018)

Nous ne sommes pas des héros. Alors, en route vers une solidarité des fatigués ?
– Valérie Nicolay

>> TICKETS – Mercredi 25 janvier 2023 à 20h00

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