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Acting : entre tragédie et comédie, la naissance d’un acteur

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Avec Acting, le Royal Festival livre une formidable pièce sur le métier d’acteur que Bernard Sens, Gauthier Bourgois et Alexis Goslain portent magistralement entre comédie et tragédie.

Lits sommaires, photo de pin-up accrochée au montant, plafond bas : l’univers de Gepetto et Horace n’a rien de réjouissant. Normal pour deux hommes purgeant leur peine dans la même cellule. Le premier est un petit escroc volubile. Le second ne disant pas un mot, on en est réduit, à travers diverses rumeurs, à imaginer son parcours scabreux dans le milieu marseillais. Quoi qu’il en soit, ces deux-là ont organisé leur routine quotidienne et s’en trouvent plutôt bien. Jusqu’à l’arrivée d’un nouveau détenu. Premiers regards, premiers échanges. On se jauge, on se méfie. Puis, petit à petit, les défenses tombent. Gepetto, avec son côté naïf et enthousiaste, fait parler Robert qui, sans doute, n’attendait que cela. Car Robert est acteur. Pas une star, pas un de ceux qu’on voit tous les soirs à la télé mais acteur quand même avec la passion du théâtre chevillée au corps.

Il n’en faut pas plus pour susciter les multiples questions de Gepetto qui, grand amateur de Rocky, de Scarface et de Saturday Night Fever, a toujours rêvé d’être une star. Pas pour jouer les grands textes comme Robert mais pour tomber les filles et faire la Une des magazines people…

Dans cette pièce, écrite après plus de dix ans d’absence au théâtre, Xavier Durringer raconte magistralement la réalité d’un parcours de comédien. Répondant aux questions de Gepetto, Robert démolit les illusions de celui-ci, évoque les réalités du métier : le long apprentissage, les espoirs, les frustrations, les fausses valeurs, les castings, les doublures… Gepetto écarquille les yeux, n’en revient pas de ce qu’il entend… mais veut plus que jamais devenir acteur. Et si Robert constate d’emblée qu’il n’a absolument rien pour ça, il va finir par se prendre au jeu et tenter de faire de son codétenu un acteur comme on n’en a jamais vu.

Atmosphère glauque
À Spa, les organisateurs ont eu l’excellente idée d’installer cette création dans les caves de la salle des fêtes. Escalier étroit, ambiance fraîche, plafond bas, lumière glauque : on ne pouvait rêver mieux pour ressentir l’ambiance carcérale dans laquelle débarque Robert, un Bernard Sens des grands jours, à la fois enflammé, exigeant, impatient, passionné, désespéré… Face à lui, Gauthier Bourgois est parfait dans le rôle du jeune gars inculte qui doit toutes ses connaissances aux jeux télévisés et aux émissions de téléréalité. Mais qui cache de solides fêlures derrière son côté crâneur.

Le tout se déroule sous le regard d’Horace (le metteur en scène, Alexis Goslain) qui ne dit pas un mot mais observe tout ce qui se passe. Entre comédie (on rit énormément aux répliques ciselées de Durringer) et tragédie, on assiste à la naissance d’un acteur, au dur apprentissage qui lui est imposé et par lequel l’auteur montre clairement qu’il ne suffit pas de pousser sa tête dans quelques émissions télévisées pour devenir un vrai comédien. Sans avoir l’air d’y toucher, la pièce s’adresse ainsi aussi bien aux amateurs de théâtre qu’à ceux qui n’y ont jamais mis un pied.

On découvre aussi, petit à petit, la personnalité des deux hommes. Celle de Gepetto, petit escroc, en prison pour avoir été dénoncé par son ex et l’amant de celle-ci. Celle de Robert, comédien accumulant les déceptions qui ont fini par le mener au meurtre.

A travers l’apprentissage d’un monologue de Hamlet, Robert va permettre à Gepetto, qui ne comprend rien au texte, de révéler son véritable potentiel. Mais en lui faisant travailler sa mémoire sensorielle, il fait aussi resurgir des émotions enfouies. On bascule ainsi constamment de la comédie à la tragédie. Et si Gepetto, persuadé que Laurence Olivier est une fille, se marre en parlant d’Ourson Welles et du Gros Towski dont il n’a jamais entendu parler, il révèle petit à petit une vraie nature de comédien. Un comédien à travers lequel Robert pourra peut-être, enfin, réalisé ses rêves…

– 12/08/22

>> TICKETS
Jeudi 18/08 à 20h30

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