COUPURES : UNE COMÉDIE SATIRIQUE PRESQUE PARTICIPATIVE SUR L’ÉTAT DE NOTRE PRESQUE DÉMOCRATIE
La compagnie La poursuite du bleu, qui se définit comme une fabrique de rêveries diurnes, tire son nom d’un roman de Romain Gary : « Dans Les cerfs-volants, Gary développe l’idée de « poursuite du bleu » pour évoquer l’envie de continuer à rêver tout en gardant les pieds sur terre, pour que les rêves ne s’envolent pas trop haut », résume Samuel Valensi, co-metteur en scène de cette joyeuse troupe aux côtés de Paul-Eloi Forget. « C’est ce que fait notre compagnie : elle porte une utopie concrète, basée sur des engagements très pratiques », ajoute-t-il.
Après L’Inversion de la courbe sur la productivité au travail et le conte écologique Melone Blu, le troisième spectacle sorti de la plume du duo d’auteurs explore les arcanes de l’administration et de la démocratie: «On voulait plonger le public dans une réunion citoyenne, en le faisant participer à une décision pour laquelle il se rend compte qu’en fait tout a déjà été décidé sans lui. C’est le principe de la participation et de la consultation aujourd’hui en politique: on nous demande notre avis dans l’isoloir, mais en fait l’essentiel de l’histoire est déjà écrit».
Prendre le temps de débattre
Dans ce spectacle presque participatif, les spectateurs sont confrontés aux limites et aux complexités de notre processus démocratique, mais, loin du militantisme, le duo Forget-Valensi privilégie l’humour pour se faire entendre: «On défend un message de sobriété et d’austérité, mais cela n’empêche pas la bonne humeur et le rire», confirme Samuel Valensi. «Le théâtre est un bel outil pour récréer une agora et prendre le temps de discuter avec le public dans la salle. Nous proposons d’ailleurs systématiquement des bords-plateaux après le spectacle. Et il serait important aujourd’hui que les élus fassent pareil et prennent le temps de débattre avec les citoyens», poursuit-il.
Être au plus près du terrain
L’intrigue de Coupures prend place dans le milieu rural que les deux metteurs en scène connaissent bien et qu’ils sont fiers de mettre en avant. Comme pour chacun de leurs spectacles, ils sont partis du terrain pour écrire le texte: «Les deux grands-pères de Paul-Eloi sont éleveurs en Vendée et mes parents à moi étaient tous les deux vétérinaires, dont l’un dans le monde rural. Nous avons également rencontré des personnes que nous ne connaissions pas et discuté avec des amis viticulteurs», explique Samuel Valensi. «Le milieu rural n’est pas un milieu facile, mais il s’en dégage aussi une grande force vitale. Nous avons d’ailleurs des retours très positifs d’acteurs de terrain qui nous remercient de l’image que nous véhiculons», se réjouit-il.
Décarboner la culture
L’engagement de la compagnie ne se limite cependant pas qu’au plateau: «Vu les spectacles que nous portons, il était nécessaire de s’engager», précise celui qui a également pris part à l’élaboration du rapport Décarbonons la culture! dans le cadre du think tank français The Shift Project Parité femmes-hommes et diminution des écarts de revenus au sein de l’équipe, costumes ou matériel de récupération, décor transportable en van, repas végétariens ou voyages en train… Voilà les grands principes sur lesquels s’accordent les membres de la compagnie. «Nous avons décidé de ne pas prendre l’avion, mais cela ne nous empêche pas de rêver d’une tournée internationale à la voile», nuance Samuel Valensi. Une chose est sûre: pour le comédien et sa compagnie, rien ne semble impossible si on prend le temps d’en rêver. Embarquez avec eux, vous ne serez pas déçus !
– Delphine Georges