APPRENDRE À ROUVRIR LES POSSIBLES DANS NOS TÊTES ET DANS NOS VIES
Dans l’ordre intellectuel comme dans nos existences ou dans la politique, le champ du possible semble s’être rétréci. Faute d’un commun minimum, nous n’arrivons plus à nous comprendre ni à nous entendre. Comment rouvrir le possible, rendre puissant, faire droit à notre quête d’intensité ? C’est le chemin qu’emprunte le philosophe Tristan Garcia en s’inspirant de la métaphysique contemporaine autant que des ressources du roman ou de la pop culture.
Tristan Garcia sera l’invité de la conférence philosophico-musicale d’avril intitulée Liberté, égalité, intensité. Romancier et philosophe, Tristan Garcia enseigne la philosophie à l’Université Lyon III. Considéré comme une des voix importantes de la pensée contemporaine, il est l’auteur d’une œuvre littéraire saluée dès ses débuts (Prix de Flore pour La Meilleure part des hommes, prix du livre Inter pour 7) et d’une œuvre philosophique déjà entrée dans le canon des universités (notamment avec Forme et objet. Un traité des choses). Après Nous, animaux et humains (2011) et La vie intense : une obsession moderne (2016), il vient de publier un traité de métaphysique Laisser être et rendre puissant (PUF) salué par la presse comme un chef-d’œuvre. Tristan Garcia y «poursuit un travail théorique impressionnant, qui se veut une «boussole» pour éviter de se perdre dans les batailles culturelles les plus aigres.» (www.nouvelobs.com, 18 février 2023)
Laisser être et rendre puissant
«Dans son nouveau traité, qui prolonge la part la plus spéculative et métaphysique de son œuvre, Tristan Garcia part d’un constat: personne n’est jamais d’accord. Pire, personne n’est d’accord sur la forme de nos désaccords. Pire encore, nous ne sommes même pas capables de nous entendre sur ces questions simples: qu’est-ce qu’il y a? De quoi le monde est-il fait? Bref, nous n’arrivons ni à comprendre le monde, ni à nous comprendre entre nous. Sur le plan métaphysique, mais aussi politique et éthique, le terrain est miné; la guerre est partout. […] Peut-on débusquer quelque chose de commun, qui nous relie tous au milieu de ce chaos informe et désespérant? Selon Garcia, il existe au fond un lien, un «universel minimum et tenable» qui nous relie tous. C’est ce que le philosophe appelle «le commun distinct». (Extrait d’une recension de Clara Degiovanni, publié le 14 février 2023, Philomag.com)
Le pari du commun distinct
Tristan Garcia «fait le pari du commun distinct et s’adresse à ceux d’entre nous qui ne se sentent pas blasés par le désaccord généralisé». Le commun distinct est ce qui nous lie tout en nous permettant d’être différents. […] La métaphysique permet, par des abstractions, de définir ce qui nous échappe et de comprendre l’organisation du monde et les rapports entre les êtres : ici, Tristan Garcia nous parlera de puissance. Si la puissance de certains êtres risque d’amoindrir la possibilité d’existence d’autres êtres, il nous faut concevoir la puissance de telle manière à ce qu’elle puisse préserver le possible. Pour cela, l’auteur met en place une métaphysique neuve: une métaphysique de la résistance. «Ce sera notre programme métaphysique: perdre le moins de possible à gagner le plus de puissance». Comment laisser être et rendre puissant? Cette idée est un idéal. Cependant, Tristan Garcia offre quelques pistes à partir de réflexions sur le temps, le vivant et le politique. (Extrait de L’heure Philo / Radio France, 31 mars 2023)