L’HUMANITÉ DES AUTRES
La conférence philosophico-musicale de décembre aura pour invité le philosophe marocain Ali Benmakhlouf qui repense ce qu’est être humain avec Montaigne, à la fois un philosophe du XVIe siècle et un penseur d’une très grande contemporanéité. Montaigne décolonial ? Ali Benmakhlouf place l’auteur des Essais au centre d’une tradition humaniste ouverte sur l’autre.
Alors que l’humanisme occidental est en crise, confronté à la remise en question de sa propre histoire coloniale et esclavagiste et mis à mal par d’autres modèles de civilisation, comment repenser l’idée d’humanité aujourd’hui ? C’est le défi que propose Ali Benmakhlouf au travers d’une relecture de Montaigne susceptible de nous ouvrir à la reconnaissance de l’humanité des autres.
Ali Benmakhlouf est professeur à l’université de Mohammed VI Polytechnique (Maroc), directeur du Centre d’études africaines. Auteur de nombreux ouvrages sur la philosophie de la logique, la philosophie arabe classique et l’éthique médicale, il a notamment publié aux éditions Albin Michel Pourquoi lire les philosophes arabes (2015, rééd. en Poche 2020), La Conversation comme manière de vivre (2016, réédité en 2022) et L’humanité des autres (2023). Dans ce dernier ouvrage, le philosophe souligne que reconnaître l’unité du genre humain est une exigence fondamentale de la raison. « La vision inclusive que je défends suppose que ce qui est labellisé comme « humanisme » devrait être pris au sérieux. […] Comment être ouvert sur l’humanité dans son ensemble et sur un humanisme qui a le monde pour mesure ? » (L’humanité des autres, p.21)
Comment parler d’humanisme aujourd’hui ? À partir d’une lecture anthropologique de Montaigne, ce livre aborde cette question par la notion de diversité au sein d’une humanité : la capacité à concevoir et juger font de l’humanité une seule espèce. Lire Montaigne permet d’aller vers la reconnaissance de « l’humanité des autres », celle de tous ceux qui ont résisté à l’esclavage, à la conversion forcée, au colonialisme, à l’inquisition. Sa voix lointaine nous fait entendre ceux qui crient justice en disant que « la vie des Noirs compte », ou ceux qui sont devenus une « humanité mobile », exposés au sort funeste de la noyade ou de la mendicité, et qu’on appelle « migrants ». En récusant les concepts de « sauvage », de « primitif », de « barbare »,
c’est le bon sens de tous qui est dans ce livre honoré, un bon sens qui est à la base de tout acte de résistance, c’est-à- dire de tout acte de liberté.
Comme toutes les rencontres proposées et animées par Martin Legros (rédacteur en chef de Philosophie magazine), la soirée sera agrémentée par les improvisations musicales d’un artiste qu’on ne pouvait imaginer plus approprié : Fabrizio Cassol. Saxophoniste, compositeur et leader d’Aka Moon – trio belge bien connu des amateurs de jazz -, Fabrizio Cassol est un musicien protéiforme, adepte du métissage qui ne cesse de multiplier les échanges avec des musiciens des quatre coins du monde, explorant musiques savantes, improvisées et traditions orales pour mieux se jouer des frontières entre les genres.
>> TICKETS pour la conférence du mercredi 13/12 à 20h00